La haine antimusulman tue. En France, dans une mosquée, pour la première fois. Alors, on s’indigne, on se rassemble et on pleure le disparu. Logique. Salutaire. Mais à en croire certains manifestants présents place de la République pour exprimer leur soutien à la cause antiraciste, ce dimanche 27 avril, il faudrait trier les larmes. Il y a désormais ceux qui ont le droit de commémorer la mort d’un homme, son meurtre abject, au nom de ses croyances, et les autres. Les autres… Un autre, en l’occurrence. Le député socialiste Jérôme Guedj, chassé de l’attroupement par les huées de quelques militants. Sur les vidéos publiées sur les réseaux sociaux, on distingue très nettement les noms d’oiseaux : des « fils de pute, casse-toi » s’entremêlent à des « sioniste dégage » pendant qu’un petit groupe reprend en choeur le fameux « PS – parti sioniste ».
Un « rituel de manif », balaie le députe dans un soupir. Car ce n’est pas la première fois : lors de la marche féministe du 8 mars dernier, l’élu de l’Essonne avait déjà été insulté et hué par des militants aux cris de « sale sioniste ». À chaque fois, Jérôme Guedj entend « évidemment autre chose », précise-t-il au micro de France Info. Il comprend « sale Juif ». Comment ne pas ? Aux yeux de ces quelques illuminés, sa venue serait même une « provocation ». Car – croit-on comprendre – Jérôme Guedj serait un traître : il a acté sa rupture avec La France insoumise au moment de la question des massacres du 7 octobre en Israël, quand le mouvement de Jean-Luc Mélenchon a refusé de qualifier le Hamas d’organisation terroriste.
Et tant pis s’il a bien sûr manifesté contre Benyamin Netanyahou et sa politique mortifère. Tant pis, surtout, si ce n’est même pas le sujet du jour. « On n’a pas de respect pour les gens comme vous », lui gueule un manifestant, avant d’affirmer sans sourciller que ce serait à cause de lui si « Retailleau est encore ministre ». Ben voyons. Voilà comment certains transforment un rassemblement antiraciste en un meeting politique. « Moi, je suis un universaliste républicain, donc quand un musulman est assassiné, quand un catholique est assassiné, quand un juif est assassiné, je pense que c’est la République qui est fragilisée, et qu’on ne doit pas laisser les uns et les autres à leur sentiment de solitude », ajoutera-t-il sur France Info. Car hier, sur la place de la République, il n’y avait pas grand monde. C’est triste. Et certains ont préféré jouer les commissaires politiques.